Consommation d’alcool : avec l’âge, des risques accrus pour la santé

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Avancer en âge rend plus vulnérable aux effets de l’alcool. La consommation d'alcool, même lorsqu'elle est considérée comme modérée, peut avoir des conséquences importantes sur la santé des personnes âgées. Diminuer la consommation d’alcool peut améliorer la qualité de vie.

Une moindre tolérance à l’alcool en vieillissant

Avancer en âge rend plus vulnérable aux effets de l’alcool. Après 65 ans, les conséquences d’une consommation d’alcool, même lorsqu'elle est considérée comme modérée, peuvent être dommageables pour la santé.

En effet, en vieillissant, l’organisme tolère moins bien l’alcool. Pour une même quantité d’alcool ingérée, l’alcoolémie sera plus élevée et le taux d’alcool dans le sang baissera plus lentement. Certaines personnes âgées sont donc surprises de présenter un état d'ivresse après avoir consommé une quantité d'alcool qu'elles avaient l'habitude de consommer sans problème lorsqu'elles étaient plus jeunes.

Après 65 ans, il est recommandé pour :

  • les consommateurs quotidiens, de ne pas dépasser un verre par jour et d’essayer d’avoir des jours dans la semaine sans consommation ;
  • les consommateurs occasionnels, de ne pas dépasser 2 verres par occasion, d’avoir au moins 2 jours sans consommation dans la semaine et de ne pas dépasser 7 verres par semaine.

Ces recommandations ont été élaborées à partir des avis et recommandations de la Société française de gériatrie et de gérontologie, de la Société française d’alcoologie, de Santé publique France et du National institute on alcohol abuse and alcoholism aux États-Unis.

Alcool et médicaments : une interaction néfaste

De nombreuses personnes âgées souffrent de plusieurs pathologies et consomment quotidiennement plusieurs médicaments.

Or, il existe des interactions entre l'alcool et les médicaments. L'alcool peut diminuer l'efficacité des médicaments ou en augmenter les effets indésirables. Ainsi, il est recommandé aux personnes âgées qui prennent quotidiennement des médicaments de parler de leur consommation d’alcool à leur médecin traitant. Ce dernier évaluera les risques d’interaction.

Consommation d'alcool : quelles conséquences ?

Chez les personnes âgées, la consommation d'alcool peut favoriser :

  • les chutes et leurs complications,
  • les troubles cognitifs,
  • les troubles du comportement,
  • la survenue d'une confusion mentale.

Il est souvent difficile d'attribuer à l'alcool la survenue de ces pathologies mais il faut garder en tête que l’alcool fait partie des causes qui peuvent expliquer ces symptômes.

C'est pourquoi il est important de faire régulièrement le point sur sa consommation d'alcool avec un professionnel de santé.

Comment agir ?

Avec l’âge, la consommation moyenne d’alcool par individu baisse. En revanche, la fréquence de la consommation régulière augmente, la consommation se faisant majoritairement pendant les repas. Il est donc essentiel de sensibiliser les personnes âgées elles-mêmes, ainsi que les personnes de leur entourage (soignants, entourage familial) sur les risques liés à la consommation d'alcool.

De nombreuses représentations sociales viennent entraver un repérage systématique des risques liés à l'usage d'alcool chez les personnes âgées :

  • une tendance à banaliser des consommations plus élevées d’alcool, à la fois chez les personnes âgées elles-mêmes et chez les soignants ;
  • la croyance erronée qu’il est trop tard pour agir ;
  • la croyance erronée que l’alcool peut avoir des effets bénéfiques sur l’état cognitif et la santé cardiovasculaire.

Arrêter ou réduire sa consommation d’alcool apporte des bénéfices à tout âge, y compris chez les personnes âgées :

  • amélioration de la qualité de vie,
  • préservation de l'autonomie,
  • meilleures performances cognitives,
  • amélioration de l'humeur et de l'anxiété…

L’amélioration de la qualité de vie est un enjeu essentiel. Ainsi, l’espérance de vie à 65 ans pour les femmes s’élève à 23,2 ans, mais l’espérance de vie sans limitation perçue dans les activités de la vie quotidienne est seulement de 11,2 ans. Pour les hommes, l’espérance de vie à 65 ans est de 19,4 ans, mais l’espérance de vie sans limitation perçue dans les activités de la vie quotidienne est seulement de 10,1 ans (source : Chiffres clés de l’aide à l’autonomie 2019, CNSA).

Que faire en cas de consommation d'alcool excessive ?

Des ruptures et des pertes liées à l’avancée en âge (passage à la retraite, veuvage, isolement…) peuvent être associées à une augmentation de la consommation d’alcool. Chez les personnes âgées qui consomment de l’alcool de façon excessive, ce phénomène est ancien dans deux tiers des cas. Dans un tiers des cas, cette consommation excessive a débuté après 60 ans.

Au-delà de 75-80 ans, le sevrage des personnes dépendantes doit se faire sous surveillance médicale. Les fragilités liées à l’âge entraînent une plus grande vulnérabilité aux symptômes provoqués par l’arrêt brutal de l'alcool. Le suivi médicalisé se fait en milieu hospitalier dans un service spécialisé. Il convient tout d'abord d'en parler à son médecin traitant qui organisera un projet d’hospitalisation pour sevrage de l'alcool.

Illustration : la situation de Monsieur X., 71 ans

Monsieur X. a 71 ans. Il est retraité et vit avec son épouse à Paris. Cette dernière a contacté les pompiers un dimanche après-midi après avoir constaté que son mari lui tenait des propos incohérents. Alors qu’ils venaient de finir de déjeuner, Monsieur X. a demandé à son épouse de se dépêcher de préparer ses affaires pour aller prendre l’avion afin de rendre visite à leurs enfants qui vivent à Lyon.

Alors que ce projet n’était pas d’actualité, Monsieur X. a insisté auprès de son épouse, a commencé à se fâcher et à déambuler dans toute la maison pour rassembler différentes affaires telles qu’une radio, des couverts et plusieurs écharpes. Monsieur X. a alors expliqué qu’ils allaient rater l’avion en mentionnant une date et une heure qui ne correspondaient pas au jour. Madame X. a alors contacté les pompiers pour leur expliquer la situation. Ils se sont alors chargés de conduire Monsieur X. aux urgences de l’hôpital le plus proche.

À l’arrivée aux urgences, Monsieur X. est très angoissé et facilement irritable. Il ne comprend pas où il est, ni ce qu’il fait là. Le médecin interroge alors Madame X. sur les antécédents médicaux de son mari. Madame X. explique au médecin que son mari n’a jamais eu de problèmes de santé, qu’il ne prend pas de médicaments et elle le décrit comme quelqu’un de plutôt « casanier ».

Une confusion mentale liée à une alcoolémie élevée

Le médecin décide alors d’effectuer différents examens dont un bilan sanguin pour comprendre l’origine de cette confusion mentale qui est apparue brutalement. Dans l’attente des résultats, il interroge Madame X. sur le mode de vie de son mari. Madame X. explique au médecin qu’ils sortent tous les matins marcher puis faire quelques courses. Ils regardent la télévision l’après-midi. Lors des repas, ils boivent en général un peu de vin rouge. Tous les samedis soir, Monsieur X. retrouve quelques amis sans son épouse pour jouer aux cartes. Madame X. se souvient que samedi dernier, c’était au tour de son mari d’apporter la bouteille de whisky.

Le médecin interroge alors plus précisément Madame X. sur les consommations d’alcool de son mari. Il apprend que Monsieur X. consomme tous les jours 2 verres d’alcool à chaque repas, et 2 à 3 whiskies le samedi soir. Madame X. est très étonnée de ces questions, car les consommations d’alcool de son mari sont les mêmes depuis qu’ils se connaissent et elle ne l’a jamais vu ivre.

Les examens sanguins mettent néanmoins en évidence une alcoolémie (concentration d’alcool dans le sang) relativement élevée, à 1,8g/L. Madame X. est encore plus étonnée, et elle demande au médecin de lui expliquer comment son mari peut avoir une alcoolémie aussi élevée. Le médecin lui explique alors qu’avec l’âge les consommations d’alcool sont de moins en moins bien tolérées. Notamment, pour une même quantité d’alcool consommée, le taux d’alcool dans le sang est plus élevé et l’organisme va mettre plus de temps à éliminer l’alcool.

Ceci explique pourquoi, sans avoir changé la quantité d’alcool consommée habituellement, Monsieur X. a présenté une confusion alors que jusqu’à maintenant, ses consommations n’avaient pas entrainé de tels troubles. Le médecin poursuit en expliquant à Madame X. qu’avec l’âge, l’état d’ivresse peut se manifester sous cette forme.

Le bilan sanguin montre également des perturbations du fonctionnement du foie qui pourraient être en lien avec une hépatite alcoolique aiguë. Le médecin décide alors d’hospitaliser Monsieur X quelques jours. Il lui prescrit des traitements adaptés pour l’hépatite et le sevrage de l’alcool.

Des soutiens possibles pour réduire sa consommation

L’état de Monsieur X. s’améliore en quelques jours et son épouse estime alors qu’il est « redevenu comme avant ». Avant sa sortie de l’hôpital, Monsieur X. a rencontré un infirmier spécialisé en addictologie qui a fait le point avec lui sur ses consommations et qui lui a expliqué les raisons de cette confusion. Il lui explique qu’après 65 ans il est recommandé de ne pas dépasser sept verres par semaine : pas plus d’un verre par jour pour les consommateurs quotidiens et deux verres par occasion pour les consommateurs occasionnels. Il est aussi recommandé d’avoir des jours sans consommation dans la semaine.

Monsieur et Madame X. n’étaient pas au courant de ces recommandations, ce qui incite aussi Madame X. à réduire sa consommation quotidienne d’alcool. L’infirmier spécialisé leur donne alors différents conseils et des brochures pour les aider à réduire leur consommation. Il propose également à Monsieur X. un rendez-vous avec un médecin addictologue deux semaines après sa sortie d’hospitalisation. En effet, l’infirmier spécialisé explique à Monsieur X qu’il peut être difficile de changer ses habitudes vis-à-vis de l’alcool. S’il est en difficulté pour réduire sa consommation d’alcool, Monsieur X. pourra donc bénéficier de l’aide et de l’accompagnement du médecin addictologue.

Monsieur X. sort également de l’hôpital avec un rendez-vous pour un bilan neuropsychologique permettant de faire le point sur sa mémoire et ses capacités de concentration, car la consommation d’alcool excessive pourrait avoir entrainé de tels troubles. Si ces troubles sont présents, Monsieur X. pourra bénéficier d’un suivi neuropsychologique pendant quelques semaines pour l’aider à récupérer ses performances cognitives.

Cet article a été réalisé avec l’équipe du service de Psychiatrie du sujet âgé à l’hôpital Corentin-Celton
Liens utiles

www.alcool-info-service.fr, le service national d’aide à distance en matière d’alcool et de dépendances